Paradoxe du consommateur #1 : L’écart – apparent – entre déclaration et comportement

déclaration et comportement

 

Dénoncer la déshumanisation du commerce. S’indigner de la prééminence de groupes comme Amazon. Uber ou Google. Contester les méthodes managériales en vigueur dans les centres logistiques (compétition entre les membres du personnel, manutentionnaires courant dans les allées pour respecter le chronomètre…).  Et la minute d’après, donner un avis dithyrambique sur ces mêmes entreprises. Acheter en ligne sur la boutique alimentaire d’Amazon et trouver que cette boutique me permet davantage d’être en accord avec mes valeurs que les concurrents – le baromètre de la valeur Shopper 2017 révèle c’est l’opinion de 47 % de ses clients), qu’elle se distingue par le respect qu’elle me témoigne – c’est l’opinion de 56 % de ses clients).

 

Se faire le porte-parole, sur les réseaux sociaux, de la défense les orangs-outans menacés par la déforestation, se positionner contre le développement de l’huile de palme.

Et une fois son Smartphone dans la poche, ouvrir un paquet de gâteaux sans se poser de question. Et surtout, ne pas bouder son plaisir.

 

Exprimer son ressentiment, en tant que contribuable, envers les entreprises comme Starbucks, Amazon ou Apple qui s’arrangent pour ne pas faire de bénéfices en France et échapper ainsi à l’impôt sur les sociétés, et exprimer sa gratitude et sa pleine adhésion en tant que client.

 

Une incohérence évidente, qui n’est peut-être qu’apparente.  En mettant à jour l’image que l’on se fait du consommateur, on peut dissiper le paradoxe.

 

La sensibilité à son expérience propre vs la sensibilité à l’expérience des autres

 

Les Français sont-ils indifférents aux conditions de travail des salariés ? N’accordent-ils aucune importance à la contribution fiscale des entreprises ?

 

Ce paradoxe peut trouver une explication dans la très forte asymétrie qui existe entre la sensibilité du consommateur à son expérience propre, la manière dont il est traité, et la sensibilité à l’expérience des autres, qu’il s’agisse des salariés ou des fournisseurs.

 

Certains produits comme le café ou le cacao échappent cependant à la loi de l’indifférence. Comment expliquer que sur certains produits, de larges franges du public soient sensibles aux conditions de production et même au caractère équitable des relations avec les fournisseurs et que ce ne soit pas le cas sur d’autres ? Les produits comme le café ou le cacao sont des produits « culte ». Ils affectent l’image que le consommateur a de lui-même. Ce sont des produits qui ont la capacité de procurer à ceux qui les consomment un bénéfice statutaire. Acheter un café issu du commerce équitable va ainsi accroître l’estime sociale qu’il a de lui.

A contrario, des spaghettis ou des bacs à glaçons auront beaucoup de mal à se placer sur ce terrain.

 

 

Ainsi, le respect des valeurs peut être un formidable levier de différenciation pour les marques et les enseignes. Mais il faut que ces valeurs procurent aux consommateurs eux-mêmes un bénéfice d’image pour qu’ils y soient sensibles.

 

 

Par Nathan Stern, Président de ShopperMind, ingénieur social, créateur de réseaux sociaux.